Saturday, September 24, 2011

CAS DE POLYGLOBULIE

La numération de Madame BO. A.C., 32 ans, fait état de 7.140.000 hématies/mm3, 22.1 g/100 ml  d’hémoglobine,  et 68.8 % d’hématocrite…
Alertée, son Médecin, Cardiologue, a accueilli le  résultat sans surprise.  Elle s’est plus intéressée au VGM : 96.3 µ3 pour une normale entre 80 et 100  et au fer sérique : 17.1 µmol/l pour une normale entre 10 et 30.  Et elle en était contente !!!
INTERPRETATION
Madame BO.A.C.  est suivie pour un problème cardiaque : le Syndrome d’Eisenmenger.
 DEFINITION (selon orphanet)(1):
« Le Syndrome d’Eisenmenger (SE) désigne une combinaison complexe d’anomalies cardiovasculaires, définies par une hypertension pulmonaire avec inversion ou bi-directionnalité du flux à travers une communication intracardiaque ou aorto-pulmonaire »(1).   
Sera traitée ici la communication intra-cardiaque
  
PHYSIOPATHOLOGIE (2) (3) (4):
La communication entre les 2 chambres cardiaques entraine une perturbation du flux circulatoire.
1/ le sang artériel, au lieu de partir par le ventricule gauche vers les tissus pour les oxygéner, il va gagner le ventricule droit et envahit le poumon.
2/ ce mouvement vers les poumons provoque des dommages vasculaires,  engendrant l’hypertension pulmonaire qui aggrave les perturbations du flux sanguin
3/ les tissus périphériques, se trouvant en état d’hypoxie, vont stimuler l’erythropoïèse, provoquant la polyglobulie retrouvée chez notre patiente.


CLINIQUE :
Les signes cliniques sont liés à l’hyperviscosité du sang, au manque d’oxygène tissulaire et aux troubles circulatoires
-          Cyanose
-          Arythmie
-          Insuffisance cardiaque
-          Hémoptysie
-          Hippocratisme digital : Doigts en baguette de tambour avec des ongles en verre de montre
-          Asthénie  et faible résistance à l’effort…
BIOLOGIE :
-          Numération : polyglobulie, hématocrite et hémoglobine augmentés, VGM et CCMH diminués
-          Diminution du fer et de la ferritine en raison de la consommation accrue pour l’érythropoïese
-          Hypoglycémie « artificielle » résultant de la glycolyse, in vitro,  par le grand nombre d’hématies
SUIVI :   Prévenir le risque thrombotique lié à la polyglobulie : 
Ce risque est d’autant plus important que les globules rouges ont un VGM bas car ces globules rouges pauvres en fer sont moins déformables que des globules rouges normaux.  Pour notre cas, la Cardiologue de Madame BO. A.C. l’a mise sous fer pour s’assurer qu’elle n’en manque pas et qu’elle ne se mette pas à fabriquer de petits globules rouges nombreux et hautement  thrombogènes.
Toujours pour prévenir les risques thrombotiques, on peut pratiquer des saignées (qui ne résolvent le problème que pour un temps !) en veillant à garder un hématocrite assez haut (5) pour que l’erythropoîese  ne se déchaine pas…
TRAITEMENT -  HYGIENE DE VIE
-          Chirurgical : greffe cœur/poumon.  Radical mais a ses indications et ses contre-indications
-          Eviter les conditions climatiques extrêmes et les activités intenses.
-          Oxygénothérapie : controversée
-          Anticoagulants : controversés aussi vu le risque hémorragique
-          Contraception : hautement recommandée car le taux de mortalité fœtale est de 25% et maternelle dépasse le 50% en cas de SE
-          Une bonne hygiène des dents et de la peau pour prévenir le risque d’endocardite, élevé chez les patients présentant le syndrome d’Eisenmenger

ET POUR RESTER OPTIMISTE :   Avec une bonne hygiène de vie, plusieurs patients atteignent l’âge adulte !

Bonne lecture !

(1)orphanet version 4.6.3. Dernière mise à jour 15-09-2011
(2) University of Maryland Medical Center website : http://www.umm.edu/ency/article/007317.htm  2011
(3)University of California San Francisco Medical Center : http://www.ucsfhealth.org/conditions/eisenmengers_syndrome/ 15/09/2011
(4) Eisenmenger Syndrome,  Mikhael F El-Chami, MD  Assistant Professor, Department of Cardiology, Division of Electrophysiology, Emory University School of Medicine, mise à jour: 5/06/2008  http://emedicine.medscape.com/article/154555-overview
(5) Les cardiopathies congénitales cyanogènes, Professeur Yvette Bernard, Révision 03/2008, http://www.besancon-cardio.org/phprint.php

   

Saturday, September 10, 2011

METHEMOGLOBINE

Monsieur  LAB. , 55 ans, présente des plaques sur les coudes et dans le dos.  Sa numération fait état d’une anémie légère :  Hb à 12.5, une hémoglobine qui ne cesse de diminuer, lentement mais sûrement  depuis un an : 14.3 en Octobre 2010, 13.0 en Mai 2011.  Ses réticulocytes sont élevés, attestant d’une bonne régénération.  Sa méthémoglobine  oscille entre 0.4 et 0.7 % d’hémoglobine, la normale étant inférieure à 2.5 % de l’hémoglobine totale d'après Biomnis.
 
Quel rapport y a-t-il entre ces différentes données ?
 
La relation  n’est pas d’ordre physiopathologique.  Elle est plutôt thérapeutique.  Monsieur LAB., pour ses lésions (dermite herpétiforme), prend un médicament  "Disulone" qui peut induire une anémie hémolytique et une méthémoglobinémie(4).  
 
Pour rester dans le vocabulaire positif, nous ne lui dirons pas :  « Vous êtes en train de faire une anémie », mais, comme dit son Dermatologue :  « Vous  supportez (encore)  bien le traitement , continuez !!! » L'histoire ne dit pas, cependant, pour combien de temps,  et pour quel résultat!  Mais ce n'est pas notre propos...
 
   
UNE PARENTHESE :  La METHEMOGLOBINE :  
 
Définition:  C'est une hémoglobine oxydée,  porteuse d’un fer ferrique Fe+++ plutôt que fer ferreux Fe++, ce qui la rend incapable de transporter l’oxygène(1)(3).  
Origine: 1/ Iatrogène: toxique (nitrites, nitrates, chlorates, naphtalène...)(1) (3) ou                           médicamenteuse (dapsone, anesthésiques locaux, quinones, antimalariques, sulfamides...)(3)
               2/ Génétique, par déficit enzymatique "cytochrome b5 reductase".(1) (2).  Le pronostic sera différent selon que le déficit enzymatique ne concerne que les hématies (typeI)  ou tous les tissus (type II) et dans ce cas, le tableau clinique est dominé par les signes neurologiques. (1) (2)
Clinique: 1/ Cyanose.  Une cyanose qui ne cède pas après oxygénation(1).                                                             
                 2/ Encéphalopathie : progressive, précoce et sévère dans la méthémoglobinémie de type II (2).  Le tableau associe : arriération profonde, hypotonie, microcéphalie, strabisme, difficultés d’alimentation et troubles de déglutition.(2) La cyanose est en arrière plan(1) (2) et la mort survient à un âge variable, souvent par fausse route.(1)(2)
 Biologie: les gaz du sang (sang  d'une couleur brun chocolat) montrent une pression d'oxygène normale mais une saturation de l'hémoglobine diminuée(1)(3).  La méthémoglobine est augmentée.
Traitement:   Ne concerne que la méthémoglobinémie de type I.  
Contre la cyanose,  le bleu de méthylène (question de goût et de couleur! :-)  Le bleu de méthylène est réducteur et peut être administré par voie intraveineuse pour les taux élevés de méthémoglobine, ensuite par voie orale, puis relayé par la vitamine C (1) (2). D'après le (3), la vitamine C et la vitamine E n'ont pas fait leurs preuves dans le traitement de la méthémoglobinémie.
 
(1): Annales de Biologie Clinique. Vol 63 N°3, 314-6, Mai-Juin 2005
 
(2): Bauvais P. La méthémoglobinémie héréditaire récessive, Encyclopédie Orphanet, Février 2004
 
(3): Méthémoglobinémie médicamenteuse-
M. ANDRADE DE MATOS AREZ PINTO DA CUNHA (assistante en Médecine interne Hôp St Luc Bouge) Louvin Médical 2006, 125, 7 : 252-255
 
(4): Résumé des caractéristiques du produit: DISULONE*  par l'afssaps, mise à jour: 14/05/2008