Friday, August 26, 2011

VIRUS EPSTEIN BARR – SITUATIONS PARTICULIERES


VIRUS EPSTEIN BARR – SITUATIONS PARTICULIERES
 
Le virus Epstein-Barr est un herpesviridae, genre lymphocryptovirus (virus caché dans les lymphocytes).  Le virus infecte les lymphocytes B et les cellules épithéliales de l’oropharynx.
C’est un virus particulier car :
1/ c’est l’un des premiers virus à être incriminé dans la survenue de pathologies cancéreuses.  En Afrique, il est très impliqué dans la survenue des lymphomes de Burkitt. En effet, il a la possibilité d’induire la prolifération continue et l’immortalité des lymphocytes B et des cellules épithéliales.  C’est ainsi qu’il est retrouvé, aussi,  dans 100 % des cancers du naso-pharynx en Afrique du nord. 
2/ un même sérum contient plusieurs marqueurs permettant d’établir un statut relativement précis de l’infection: primo-infection, infection ancienne, réactivation, lymphome, …
INDICATIONS DE LA SEROLOGIE
Dans notre pratique courante, la sérologie EBV est demandée,
1/ soit pour le diagnostic étiologique d’un syndrome mono-nucléosique, 
2/ soit chez l’immuno-déprimé pour évaluer le risque de survenue de maladie néoplasique due au virus Epstein Barr.  Dans un contexte de greffe, sont candidats à cette sérologie  les donneurs (s’ils sont vivants !!!) et les receveurs,  qui feront l’objet d’un suivi après la greffe.  En effet, les désordres lympho-prolofératifs dans les suites d’une transplantation d’organe se développent chez 1 à 10 % des malades greffés d’organe et sont fréquemment associés au virus Epstein-Barr.
3/ une autre situation particulière justifie la sérologie EBV : en cas d’apparition d’un rash cutané après prise d’ampicilline face à une suspicion d’angine bactérienne.  Ce rash aurait été longtemps interprété comme une allergie à la pénicilline ( ?).   Alors que, en réalité, c’est l’administration (à tort !) de pénicilline en cas d’infection par le virus Epstein Barr qui génère le rash.  Une sérologie EBV montrant une primo-infection confirme l’erreur diagnostique et l’erreur de traitement…   
 
INTERPRETATION DU PROFIL SEROLOGIQUE
La plupart des trousses permettent de détecter les anticorps  classiques,  à savoir, IgG et IgM EBNA, IgG et IgM VCA. 
Pour les EBNA non répondeurs, soit 20% des patients infectés, certaines trousses détectent aussi les IgG anti P22, plus constantes que les IgG EBNA, témoins d’une infection ancienne.
Les IgG EA, témoins d’une réplication virale active, apparaissent lors de la primo-infection.  Au cours d’une réactivation, le taux d’anticorps IgG EA augmente souvent.  Leur présence est plus constante que les IgM.
Les IgA anti VCA et anti EA sont des marqueurs importants du diagnostic du cancer du naso-pharynx.
La réactivation peut passer inaperçue chez l’immunocompétent, mais est redoutable chez les immunodéprimés.
Il est judicieux de rajouter une ligne IgG EAD, facultative, dont on ne se sert que si le profil le justifie.  Dans ce cas, il faut  appeler le clinicien à considérer la sérologie en fonction du contexte clinique, du statut immunitaire du patient et de l’origine géographique, car, comme signalé précédemment, le virus Epstein Barr est retrouvé dans 100% des cancers du nasopharynx  en Afrique du Nord . 
 
CAS CLINIQUES :
1/ Mr K.A., 71 ans, d’origine maghrébine, souffre d’un cancer du naso-pharynx détecté depuis 2007.
Sa sérologie montre : IgG anti EBNA +++
                                       IgG anti VCA +++
                                       IgG anti EA +++
                                       IgM anti VCA  < 0    
                                       IgA anti VCA +++
                                       soit un profil de contact ancien avec témoin de réplication virale active, et un
                                       marqueur du cancer du naso-pharynx.
2/ Mr M.R., 46 ans, greffé du foie, est de ce fait sous immuno-suppresseur. 
Sa sérologie montre :  IgG anti EBNA +++
                                        IgG anti VCA +++
                                        IgG anti EA ++
                                        IgM anti VCA  <0
Questionnée sur la conduite à tenir dans ce cas de figure, son Médecin  dit qu’il faudrait juste diminuer la dose d’immuno-suppresseur pour faire barrage à la réplication du virus Epstein Barr.  Un contrôle est prévu au bout de 6 mois… 
à suivre…
 
Spectra biologie n°143. Janvier- Fevrier 2005
 Précis de Biopathologie  Biomnis 2007
Mononucléose infectieuse et syndromes mononucléosiques  J-M Seigneurin -1995
Annales de Dermatologie et de Vénérélogie  Vol 131, N°12 Décembre 2004 pp 1085-1091

Tuesday, August 23, 2011

Hyperbilirubinemie d'un nourrisson de 2 mois

Bébé  Adame, né le 24/04/2011 est adressé au laboratoire le 29 juin 2011, à 2 mois,  pour un bilan d'ictère persistant.
 
Hémoglobine: 10.3 g/100ml  (normale pour son âge)
bilirubine totale: 103 µmol/l        bilirubine libre:  98.8 µmol/l
haptoglobine:  0.38 g/l
test de coombs direct: négatif
 
Discussion
d'après le cours du Pr. P. Rambaud du CHU de Grenoble (1)
 
et d'après l'article Ictère et allaitement
 
L'ictère néonatal "physiologique" régresse normalement au bout de 1 à 2 semaines maxi chez le bb né à terme et au bout de 3 semaines chez le prématuré (1).  Adame a plus de 2 mois.
 
Ce n'est pas un ictère hémolytique car l'haptoglobine est normale et le coombs direct est négatif.
 
Il s'agit en fait d'un ictère lié à l'allaitement maternel, car Adame est nourri au sein. Les constituants lipidiques du lait maternel inhibent la conjugaison hépatique de la bilirubine d'ou l'accumulation de bilirubine libre dans le sang du nourrisson. Cet ictère n'est pas dangereux et ne justifie pas l'arrêt de l'allaitement, toujours d'après le Professeur RAMBAUD.(1) 
 
Quel  est l'intérêt, pour le bébé, de cette accumulation de bilirubine libre?  Pourquoi les mammifères, lors du métabolisme de l'hémoglobine transforment-ils la biliverdine, totalement inoffensive, en bilirubine, potentiellement toxique? (2)  La réponse réside peut être dans le fait que la bilirubine est un puissant anti-oxydant dont le bébé a besoin pour venir à bout de ses radicaux libres(2).  La voie de recherche est ouverte pour confirmer ou infirmer...
 
 
 

Sunday, August 21, 2011

Troponine: cas cliniques

1/ Madame D.F. a consulté le 21/06/2010 pour essoufflement.
 troponine: 0.29 ng/ml,   DDM: 7.10 mg/l,  pro BNP: 1107 pg/ml.  Elle a été admise en soins intensifs le soir même et en est sortie le lendemain:  aucun signe de nécrose myocardique d'après son medecin.  Elle a reçu une poche de sang en raison de son anémie (pas de numération faite chez nous), et a été mise sous anticoagulants...
2/ Monsieur B.R.   troponine: 0.07 ng/ml.  Aucune nécrose du myocarde, par contre, obstruction avancée de la carotide
3/ tout récemment, Madame R.l, douleurs thoraciques,
troponine 0.32, DDM: 0.57, admise en urgence à la clinique protestante.  Son Médecin ne s'explique pas l'origine de sa douleur ni de l'élévation de la troponine.  A déjà fait un accident vasculaire cérébral, et présente des troubles rénaux.
SUGGESTION:  Dans les interprétations de troponine, il faut introduire le terme consacré de "Elévation Non Thrombotique de Troponine" ENTT, largement décrit dans la littérature et qui concerne entre autre (sans être exhaustive) les insuffisances rénales sévères, les embolies pulmonaires aigües, les efforts soutenus type marathon...   
La troponine garde cependant sa valeur diagnostique si elle présente une élévation d'au moins 30% en 3h.

LE SUCRE, ANTALGIQUE DU NOURRISSON

Information donnée par Aurélie de Bron, largement décrite dans la littérature.  Les références sont données au fur et à mesure
Le sucre est utilisé comme analgésique avant de pratiquer des prises de sang chez le nouveau né de moins de 3 mois.
En effet, la douleur, en plus de son inconfort pour le bébé, "elle conduit à une diminution de l'oxygénation, à une instabilité hémodynamique ou à une augmentation de la pression intra-crânienne"(1)
Mode d'emploi:
solution de saccharose entre 25 et 30% à administrer 2 mn (délai de rigueur) avant la prise de sang dans une tétine.  La succion, associée au gout sucré, appuie l'effet antalgique.  Ce qui est interessant c'est que cela ne modifie pas la glycémie(2)(3).  La solution peut être préparée au laboratoire (pas pratique), sinon, il existe des préparations dans le commerce "sweet ease" en dose unitaire, présentation utilisée à l'Hôpital Femme Mère Enfant (HFME) de Bron.  D'un point de vue pratique, je ne sais pas si nous, qui opérons en la présence des parents, pouvons nous servir du sucre sans risquer de leur donner de mauvaises habitudes, et de le présenter comme un remède, alors que les diététiciens et les campagnes de santé le dénigrent.
 D'autres moyens peuvent aider aussi, comme le peau à peau, la présence des parents et la musicothérapie(1).  A nous les berceuses!
Quelques précautions pour la prise de sang du nouveau né
 Il faut préférer, quand c'est possible, la prise de sang veineux au pli du coude ou au dos de la main.  Au niveau du talon, il est recommandé de piquer à "l'extérieur d'une zone délimitée par 2 lignes partant respectivement entre les 3ème et 4ème orteil et le milieu du gros orteil"(4).  Ce mode de prélèvement doit être limité à certaines analyses: bilirubine, calcémie, car il provoque une hémoconcentration et une hémolyse.  Il faut savoir aussi qu'il provoque dans 3 à 8% des cas une ostéomyélite du calcanéum et qui peut se compliquer d'une déformation du pied. (4)
Les aiguilles creuses et les vaccinostyles sont prohibés (4).  Au HFME, ils se servent de lancettes pour dextro.
(3) cat.inist.fr/?aModele=afficheN&cpsidt=15446260
(4) SPECTRA BIOLOGIE n°161. Septembre-Octobre 2007

THYROGLOBULINE à propos d'un cas

Monsieur Le. Fl. , a subit une ablation de la thyroide avec traitement radio à la fin du mois de Mars 2011.  Vers la mi-Avril, il est venu faire un dosage de la thyroglobuline:  résultat: 0.4 µg/l
Que signifie cette valeur dans ce contexte? 
Sommes nous en droit d'attendre une valeur nulle, comme pour le PSA après ablation de la prostate?
Thyroglobuline après ablation totale
Renseignements pris auprès de Dr L. chirurgien:
-  L'intervention étant récente, une valeur positive, mesurable, ne signifie pas l'échec du traitement.  On raisonne plutôt en terme de cinétique.  Les dosages doivent montrer une baisse progressive.  Plus tard, entre 3 et 6 mois, un dosage de contrôle est effectué sous stimulation, pour amplifier la réponse.  Et là, la thyroglobuline doit être indétectable.  Fin d'interprétation.
Interférence des anticorps antithyroglobuline
D'après le "Précis de biopathologie de Biomnis  édition 2007"  et "le cahier de formation n° 14 de Bioforma 1999", qui confirment la vision  de Dr L.,  l'interprétation de la thyroglobuline doit tenir compte, entre autre, de la présence d'anticorps antithyroglobuline.  Ces anticorps interfèrent et en général, sous estiment le taux de thyroglobuline, rendant la valeur ininterprétable.  Cet inconvénient technique est toujours d'actualité.  Il est possible, cependant, de le contourner, dans certains cas.  En effet, après ablation totale de la thyroide et disparition de la thyroglobuline, les anticorps antithyroglobuline finissent eux aussi par disparaitre au bout de 2 à 3 ans.  Dans ce cas de figure, une réapparition des anticorps signifie indirectement la réapparition de la thyroglobuline dont il faut élucider l'origine.
Thyroglobuline après ablation partielle
La thyroglobuline n'est pas un paramètre de diagnostic, c'est surtout un paramètre de suivi.  En cas d'ablation partielle, le taux de thyroglobuline est proportionnel à la quantité de tissus restant.  Une ascencion du taux de thyroglobuline doit faire rechercher une pathologie sous jacente
Qu'en est-il du PSA:
Après prostatectomie totale, le PSA aussi décroit et ne devient indétectable
(<0.1 ng/ml)  que au bout de 3 à 4 semaines.  Quant le taux remonte, la vélocité (cinétique) du PSA est informative. 
Différents schémas sont proposés selon les auteurs:
  
   1/  Un temps de doublement inférieur à 11 mois est un faveur d'une métastase viscérale
   2/   Une vélocité inférieure à 0.75 ng/ml/an est un faveur d'une hypertrophie bénigne.  Supérieure, elle est évocatrice de cancer. 
Donc, nous ne nous affolerons pas dès que le taux de PSA décolle du "zéro".
 Un détail préanalytique insolite pour le PSA:  Le taux diminue de 18 à 50 % le lendemain de l'admission en service hospitalier!!! 
Bonne lecture!