AU CŒUR DE LA THYROGLOBULINE
Hédia
Mili, Mars 2017
ALINE
Madame
Aline D 7022421009, a fait un bilan le 21 Février dernier .
T3L: 5.15 pmol/l (VU: 3.1 à 6.8),
T4L: 17.2 pmol/l (VU: 12 à 22)
TSH: 1.37 mU/L (VU: 0.27 à 4.2)
Thyroglobuline (TG): 567 µg/l (VU: 3.5 à 77)
VS: 94 mm (VU: inf à 15)
CRP: 27 mg/l (VU: inf à 5)
Son médecin (son frère !), pas surpris par la valeur de la TG, penche pour une
thyroïdite.
Un 2ème bilan de
contrôle le 9 Mars suivant a donné les résultats ci-dessous : persistance de l’inflammation,
anticorps anti-thyroïdiens normaux, baisse de la TG, et la thyroïde s’est
emballée !
T3L: 7.74 pmol/l (VU: 3.1 à 6.8),
T4L: 28.2 pmol/l (VU: 12 à 22)
TSH: 0.015 mU/L (VU: 0.27 à 4.2)
TG: 356.4 µg/l (VU: 3.5 à 77)
La
patiente a fait entre-temps d’autres explorations par imagerie qui ont permis
de porter le diagnostic de : Thyroïdite de De Quervain
Qu’est ce que la
thyroïdite subaiguë de De Quervain ?
« Souvent décrite comme une
grippe de la glande thyroïde cette inflammation survient le plus souvent
quelques semaines après un épisode banal d'une affection des voies
respiratoires supérieures »(4).
« La vitesse de sédimentation et le taux de CRP
sont élevés, de manière très variable en rapport avec la chronologie de la
maladie. La TSH est abaissée pendant plusieurs semaines alors que l'élévation
de la T4 libre est souvent présente mais brève » (4)
« Affection
banale d’origine virale, se traduisant par un état inflammatoire initial dans
un contexte grippal, avec goitre douloureux, fièvre, augmentation de la VS et
de la CRP. Elle s’accompagne d’une phase
initiale d’hyperthyroïdie (par lyse des cellules) suivie d’une phase
d’hypothyroïdie, puis récupération en 2 ou 3 mois. Le
diagnostic est essentiellement clinique, mais peut être aidé par l’échographie
(aspect hypoéchogène).»(3)
Aline
suit le schéma classique, et sa TG est montée en raison de la lyse
inflammatoire.
« La thérapeutique habituelle comporte la
prescription d'anti-inflammatoires…sur une période de plusieurs semaines, vu le
caractère parfois prolongé ou récidivant de cette maladie. Un bétabloquant peut
être prescrit initialement en présence d'une symptomatologie cardiaque »… « Les
antithyroïdiens ne sont pas indiqués car l'hyperthyroïdie est liée à un largage
hormonal et non à une synthèse augmentée comme dans la maladie de Basedow ou
l'adénome toxique »(4).
La
thyroglobuline est une glycoprotéine exclusivement synthétisée par les cellules
folliculaires de la thyroïde. Elle est
majoritairement sécrétée et stockée dans la lumière folliculaire, et la
quantité secrétée est inférieure à 10% de la quantité produite. En cas d’inflammation, la TG est secrétée en
masse dans la circulation ; dans les cancers, la TG secrétée tend à 100%
de la TG produite.
ANDREE
Madame Andrée B 7030906008 a eu un cancer de la thyroïde,
ayant nécessité son ablation totale.
Depuis, elle dose sa thyroglobuline une fois par an en moyenne depuis
2010 (du moins
sur Alysé !). Elle est toujours revenue indétectable.
La thyroïde est le seul organe à synthétiser la TG. Sa concentration sérique, corrélée au volume
de tissus thyroïdien, permet d’en estimer la masse.(2)(7). Le cancer thyroïdien
est l’indication principale du dosage de la TG(2) Elle est dosée avant
traitement pour apprécier la capacité sécrétoire de la tumeur. Après exérèse partielle ou totale, la
concentration de TG décline (2)
« Après
thyroïdectomie totale, elle doit être effondrée. La persistance ou la
réapparition de taux détectables de TG est en faveur de métastases ou de la
repousse de tissu thyroïdien. Le dosage de TG est plus sensible lorsqu’il est
effectué en « défreinage », c’est à dire sous stimulation par la TSH
endogène après 1 mois d’arrêt du traitement par T4, ou sous TSH
recombinante. » (2) (3)
« Après
thyroïdectomie totale, les auto-anticorps se négativent dans les mois ou années
qui suivent, pour ceux qui ne présentent pas de récidives. La présence ou
l’augmentation d’auto-anticorps anti-TG à distance (plusieurs années) reste un
facteur de mauvais pronostic et parfois le signe d’une récidive ». (1)
La
persistance ou la réapparition des anticorps anti-TG circulants en regard d’une
TG indétectable peut être considérée comme un «indicateur » de persistance de
la maladie.(7)
FRANCIS
Monsieur
Francis N (7030925063) 58 ans, a eu un cancer de la thyroïde en 2001. Depuis nous le suivons régulièrement pour sa
TG et ses anticorps anti-TG
08/06/11
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22/09/12
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08/06/13
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26/04/14
THYROGEN®
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07/06/14
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28/02/15
|
10/10/15
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23/01/16
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04/03/16
|
25/03/17
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TG µg/l
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<0.2
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0.2
|
0.3
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2.4
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---
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<0.1
|
0.3
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---
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0.5
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0.16
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AC ANTI-TG
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16
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10
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< 10
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???
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< 10
|
19
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13
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15
|
15
|
16
|
Contrairement à la TG de Madame Andrée qui est restée indétectable,
celle de Mr Francis varie, et les anticorps anti-TG avec. Face aux variations de la TG, son médecin,
Professeur LE BERRE, l’a soumis à un
test dynamique de stimulation au Thyrogèn® qui amplifie la réponse de
l’éventuel tissu thyroïdien. C’est ce
qui explique le bond de la TG à 2.4 µg/l. « Peu de données existent dans la littérature sur les seuils de
réponse à la rh TSH, c’est à dire le taux au delà duquel une rechute peut être mise en évidence. Un seuil «institutionnel » est à déterminer
par chaque centre en fonction de la méthode utilisée. La signification clinique d’élévations minimales de
Tg sous rhTSH reste inconnue et doit être évaluée. En présence d’Ac anti-TG,
l’absence de réponse de TG sous rhTSH doit être interprétée avec
prudence »(7)
Avec sa
TG détectable après Thyrogen®, Monsieur Francis a eu droit à un
traitement isotopique, qui permettrait en même temps, par les techniques
d’imagerie, de localiser les éventuelles reprises et/ou métastases…
JOSIANE
Madame Josiane 7030902059 est suivie pour des nodules
thyroïdiens depuis 30 ans et elle fait doser sa thyroglobuline.
02/03/17 TG: 712.40 µg/l VU: 3.5 à 77
21/09/16 TG: 213 µg/l VU: 0.0 à 35.00
Selon les
règles de l’art, son médecin lui prescrit en même temps des anticorps anti-TG
qui permettent de valider la valeur de la TG et ils ont toujours été normaux.
Même si
les nodules thyroïdiens ne sont pas une indication pour le dosage de la TG(6),
car elle ne permet pas de distinguer un nodule bénin d’un nodule malin, le
clinicien est peut être inquiété par une clinique qui nous échappe au
laboratoire et il pousse sa patiente à
aller faire une ponction.
Pour
l’instant, elle continue à faire de la résistance…
CONCLUSIONS
1/ La thyroglobuline est
spécifique du tissu thyroïdien et son taux est proportionnel à la masse de tissu.
2/ La thyroglobuline n’est
pas un paramètre de diagnostic de cancer de la thyroïde, car elle est élevée
dans de nombreuses pathologies bénignes.
Elle est cependant un très bon paramètre de suivi après exérèse
partielle ou totale.
3/ Le dosage de la TG doit
impérativement être accompagné d’un dosage des anticorps
anti-TG, autrement il est ininterprétable.
En effet, la TG est dosée par méthode immunologique et les anticorps
anti TG peuvent rentrer en compétition avec le réactif en minimisant le résultat. Nous pourrons peut être, comme Biomnis, faire
apparaître cette relation sur nos comptes-rendus.
4/ A côté de son indication principale de suivi de cancer thyroïdien, la
thyroglobuline peut s’avérer utile en cas d’hypothyroïdie néo-natale: si agénésie
(ou athyréose) la TG est nulle, et si ectopie, la TG est détectable(2). Le
dosage de la thyroglobuline trouve son intérêt aussi pour différencier une
hyperthyroïdie vraie, où son taux est élevé, d’une hyperthyroïdie factice où
elle est effondrée. L’hyperthyroïdie
factice concerne typiquement un professionnel de santé, qui a facilement accès
aux médicaments, et qui prend des hormones thyroïdiennes pour maigrir. Il présentera les signes de l’hyperthyroïdie mais sa
thyroglobuline est effondrée car sa thyroïde est mise au repos par feed-back(3).
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